Dépendance aux jeux d'argent : que faire ?

Roulette ou machines à sous au casino, soirées poker, jeux de grattage, paris sportifs… Les jeux d’argent peuvent parfois devenir une véritable addiction. Comment la repérer et surtout y remédier ?

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Rédaction SoPress

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Une dépendance comportementale

Si pour la majorité d’entre nous, les jeux d’argent évoquent simplement un divertissement, un moment de détente ou un occasionnel « je tente ma chance », ils peuvent faire basculer et précipiter certains dans l’abîme de l’addiction. On parle alors d’une dépendance comportementale ou d’addiction « sans substance », contrairement à l’alcoolisme ou à la toxicomanie. Ça peut concerner les jeux vidéo, par exemple, le shopping compulsif, les réseaux sociaux, l’exercice physique ou encore les pratiques sexuelles. Mais l’addiction aux jeux d’argent « est probablement la plus fréquente des dépendances comportementales. On n’a pas beaucoup de chiffres, mais ça peut toucher jusqu’à 1 % de la population », explique le Professeur Michel Lejoyeux qui dirige le Service de Psychiatrie et Addictologie à l’hôpital Bichat, à Paris, service qui propose d’ailleurs des consultations spécialisées pour les dépendants aux jeux d’argent.

Des profils plus enclins que d’autres

Si on sait désormais que les femmes sont par exemple plus sujettes à la dépression que les hommes, c’est l’inverse pour la dépendance aux jeux d’argent, plus répandue dans la population masculine. Mais aussi chez « les personnes qui ont déjà une addiction à une substance », comme le tabac ou l’alcool, précise le Pr Lejoyeux, et chez celles « qui ont dans leur famille quelqu’un qui a un problème d’addiction avec les jeux d’argent ». Fabrizio, fringant quinquagénaire, buvait ainsi déjà beaucoup trop quand il a plongé, dans sa trentaine, dans la dépendance aux jeux d’argent via des soirées bridge entre potes. Aujourd’hui sobre et délivré de l’emprise des jeux (il fréquente toujours les Alcooliques anonymes et voit un addictologue tous les mois), ce Parisien décrit cette période de sa vie comme une « spirale infernale. Quand j’y repense, je vois un gouffre ». Il faut aussi être plus attentif si un proche ou soi-même traverse des états de dépression. « Ces états peuvent faire le lit à une addiction aux jeux d’argent », explique le médecin qui en parle d’ailleurs dans son ouvrage L’Aventure de la bonne humeur (Robert Laffont), paru en novembre dernier.

Une épreuve aussi pour l’entourage

Pas facile de vivre avec un addict, quelle que soit la dépendance, et celle aux jeux d’argent n’y fait pas exception. « Un joueur d’argent va être plus passionné par ses jeux que par sa famille ou son conjoint. Et ça n’est évidemment pas très agréable d’avoir un conjoint plus intéressé par le casino que par vous », résume le psychiatre. Pour Cathleen, réaliser que son père était addict aux jeux d’argent a été brutal. « C’est quand les huissiers sont venus que ma mère et moi avons saisi l’ampleur du problème. On savait tous que papa passait des soirées au casino, mais on ne soupçonnait pas le montant des sommes qu’il perdait. Pour combler les trous, il avait siphonné différents comptes épargne, dont celui pour les études de mon petit frère. » C’est d’ailleurs souvent les conséquences financières qui alertent l’entourage. « Il n’y a pas de manière de jouer régulièrement sans perdre de l’argent », avertit le Pr Lejoyeux.

Des critères précis pour évaluer cette addiction

Avant d’en arriver aux huissiers, comment savoir que soi ou un proche n’est pas qu’un simple joueur occasionnel, mais est dépendant ? « C’est la seule addiction définie par des critères comportementaux précis », explique le médecin avant de les détailler. « Le premier c’est évidemment une pratique de jeu qui provoque des dommages financiers et relationnels. Le deuxième critère c’est la perte de contrôle : un joueur pathologique pense, par exemple dans un casino, jouer seulement quelques euros, mais il va perdre le contrôle de ce qu’il joue. Le troisième qui est peut-être le plus important, c’est l’impression de pouvoir maîtriser le sort. Au fond, tous les joueurs d’argent que je vois me racontent la même chose : ils pensent qu’ils ont un talent particulier pour maîtriser ce qui est en fait de l’ordre de l’aléa. Et le quatrième critère c’est qu’il n’y a pas de régulation. C’est-à-dire qu’ils retournent jouer après avoir perdu. »

Le premier pas vers la guérison

On dit souvent que réaliser qu’on a un problème d’addiction est le premier pas vers la guérison. Mais comment effectivement se sortir de cette spirale ou aider un proche à le faire ? Après l’épisode des huissiers et une grande discussion familiale, le père de Cathleen a ainsi fait la démarche de se faire interdire de casino. « Ça a permis de limiter le problème, explique la jeune femme. Mais, ça n’a pas tout réglé. Il n’y a pas que les casinos pour jouer de l’argent. » Il est aussi primordial de rappeler qu’on parle d’une maladie et non d’un manque de volonté. « Cette addiction donc être prise en charge comme n’importe quelle maladie, explique le Pr Lejoyeux, pourquoi pas en en parlant d’abord à son médecin généraliste. »

Des traitements efficaces

La solution pour s’en sortir ? Rien de magique ou de coûteux. Le Professeur Lejoyeux insiste : « Il faut aller en consultation », comme celles spécialisées que propose son service à l’hôpital Bichat, ou chez un psychiatre. On peut aussi choisir des réunions de groupe, comme SOS Jeux… « Ces traitements sont efficaces, affirme le médecin. En commençant un suivi, le joueur pathologique va petit à petit prendre conscience de son problème et corriger les troubles intellectuels à l’origine du jeu d’argent. »

Une vigilance accrue pour les ados

Concernant les jeunes, et particulièrement les ados, le Pr Lejoyeux, n’hésite pas à mettre les parents en garde : « Il faut être particulièrement vigilant. Il est extrêmement déstabilisant pour un adolescent de gagner une grande somme d’argent et toutes les addictions au jeu commencent par des moments où on a beaucoup gagné. L’argent qu’on gagne met plus en danger que l’argent qu’on perd. » Car, comme le résume le médecin : « Si on perd tout le temps, on sera moins tenté de jouer. »

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