Deuil périnatal : comment le vivre et le surmonter ?

C’est un événement bien souvent tabou qui cause une douleur immense aux familles qui en sont victimes. Chaque année en France, près de 7 000 femmes et couples perdent un enfant en cours de grossesse ou lors de ses premiers jours de vie. Face à la tragédie, les proches sont souvent démunis. Pourtant il est essentiel de se faire accompagner. Témoignages

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Rédaction SoPress

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En 2023, Maryline Serrano vit un événement déchirant. Alors qu’elle est enceinte de son troisième enfant, elle apprend lors d’une échographie a priori anodine que son bébé présente un épanchement pleural (du liquide autour des poumons). Au bout de plusieurs semaines d’examens complémentaires, vécus comme autant de montagnes russes entre espoirs et craintes pour elle et son mari, le diagnostic tombe : leur bébé est atteint du syndrome de Noonan, une maladie génétique qui implique des pathologies extrêmement lourdes et affecte le pronostic vital de l’enfant. Après une discussion avec le corps médical, Maryline et son époux prennent la décision déchirante de recourir à une Intervention médicale de grossesse (IMG) lors de son septième mois de grossesse : « Le bébé bouge dans le ventre, en apparence, il donne signe de bonne vitalité, de bonne santé. Demander au médecin, alors que je porte la vie, de programmer sa mort, ça a été une décision extrêmement difficile. »

Un délicat accompagnement du deuil

À l’image de Maryline Serrano et de son mari, chaque année, près de 7 000 femmes et couples perdent un enfant en cours de grossesse ou lors de ses premiers jours de vie. Commence alors le deuil périnatal qui survient selon l’OMS après le décès d’un bébé in utero, à la naissance, dans les jours ou les semaines après sa naissance. Certains, comme Marilyne Serrano considèrent même que cette définition doit être étendue aux IVG ou aux fausses couches. Souvent, le deuil périnatal est un tabou face auquel les proches sont désemparés. D’autant que, comme le bébé n’a pas eu le temps de partager, la vie de ses parents, son existence n’est pas toujours “réelle” ou palpable pour eux. Les personnes endeuillées sont encore davantage isolées que lors d’un deuil classique : « Les relations avec notre entourage sont devenues difficiles. Les gens ne savaient plus comment nous aborder. Et quand on est coincé dans notre souffrance, on en veut beaucoup à l’entourage de ne pas être comme on voudrait qu’il soit », abonde Maryline qui doit à l’époque affronter des réflexions bienveillantes, mais maladroites. « Certains proches me disaient : allez, relève-toi, tu as deux enfants quand même… »

Se faire aider

C’est dans ce contexte qu’intervient régulièrement Yveline Exbrayat. « Le problème, c’est que tout le monde va proposer des solutions et des consolations, chercher à donner des réponses plutôt qu’une oreille attentive. Or une personne qui souffre, est en recherche d’écoute active pas de consolation », explique cette psychologue spécialisée dans le périnatal. Bien souvent, elle constate chez les proches, mais aussi souvent chez les conjoints ce qu’elle appelle « la posture du guerrier », c’est-à-dire vouloir aider à se relever la personne qui souffre, espérer qu’elle soit dans l’action plutôt que dans l’écoute de son deuil. « On voudrait que le deuil se passe vite, mais l’accompagnement du deuil consiste avant tout à faire présence, à partager l’émotion. Cela permet à la personne qui souffre de se sentir comprise. » Le rôle de cette praticienne, qui exerce à Orléans, est d’apporter ce soutien émotionnel quand les familles et les conjoints – parfois encore plus effondrées que la femme qui a perdu un enfant – ne sont pas en mesure de la faire.

Lever le tabou du deuil périnatal

Une chose est certaine, malgré la souffrance immense, malgré l’aspect tabou de la disparition et la difficulté à mettre des mots sur l’indicible, il faut rompre l’isolement pour faire ce cheminement qu’est le deuil : « Il existe beaucoup d’options maintenant pour se faire accompagner dans ce moment de vie », explique Maryline Serrano. Parmi celles-ci, les associations. Agapa par exemple, propose un soutien aux personnes confrontées au deuil périnatal. Depuis 2011, cette association forme les professionnels de santé et de la périnatalité afin de leur donner des clés qui leur permettront un meilleur accompagnement des personnes touchées. D’autres initiatives, telles que l’opération « une fleur, une vie », agissent pour lever le voile sur le tabou du deuil périnatal. Il faut parler est ne pas mettre les choses sous le tapis pour emprunter le chemin du deuil. Pour Maryline Serrano, ce cheminement a véritablement débuté lors qu’elle a accouché d’Ugo, son « bébé lumière » le 13 septembre 2023. Paradoxalement sa mise au monde est un vrai soulagement pour sa maman : « Sa découverte a balayé toutes des heures de souffrance. Sa présence était magique. » Entre la naissance et les funérailles d’Ugo, Marilyne partage des moments avec lui : « On a vécu avec lui des choses qui, d’un point de vue externe, peuvent paraître un peu glauques. Mais qui, dans la reconstruction, sont extrêmement importantes. Il faut créer des souvenirs. D’ailleurs les sages-femmes et l’équipe médicale prennent des photos. Quand les parents ne veulent pas voir, elles les gardent dans un dossier médical au cas où ils réclameraient un jour. »

Se reconstruire après la perte

Le 21 septembre, Marilyne entame son processus de reconstruction. Après les funérailles, elle décide d’écrire un livre et de raconter son expérience aussi bien pour elle que pour accompagner toutes les personnes qui doivent affronter la perte d’un enfant : « J’ai fini l’écriture au mois de juin 2024 et j’ai voulu qu’il soit publié le 13 septembre 2024, pour son premier anniversaire. » Depuis, cette ancienne coiffeuse consacre sa vie à accompagner les personnes qui, comme elles, ont été confrontées au drame. Elle a effectué une reconversion vers le métier de thanadoula (une personne qui accompagne les personnes en fin de vie et les personnes en deuil) spécialisée en périnatalité et pédiatrie, et se déplace dans toute la France en conférence, pour sensibiliser au deuil périnatal et sur l’importance de redonner une place à la mort dans nos vies.

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