Patrice Ras est spécialiste en gestion de carrière. Il a animé des ateliers de préparation d’entretien d’embauche dans le supérieur et enseigne depuis plus de vingt ans les techniques de recrutement aux cadres, managers et gestionnaires de ressources humaines. Il est l’auteur de l’ouvrage Le Grand Livre de l’entretien d’embauche, publié aux Éditions Studyrama.
Quelle est la préparation idéale avant un entretien d’embauche ?
Patrice Ras : La clé d’un entretien réussi, c’est d’en préparer assidûment toutes les étapes préalables. Comme personne ne peut anticiper, et donc pleinement maîtriser l’interaction une fois le moment venu, le candidat doit d’abord s’assurer de parfaitement connaître son sujet : s’informer sur l’entreprise, sa manière de communiquer sur les réseaux sociaux, sa culture, ses produits ou services, et ses valeurs. Cela lui évitera de se rater à une première question basique, qui est, d’expérience, l’une des choses les plus déstabilisantes en entretien. Je recommande souvent aux étudiants de simuler des entretiens seuls, dans un espace qui les rassure, en imaginant les questions et les réponses qui peuvent être apportées. Un enregistrement vidéo, pour observer ses expressions faciales et corporelles, peut aussi être utile. Le recrutement, c’est comme un sport. Si on veut mettre le ballon dans le filet, il faut parfois tirer cent fois avant de marquer un but. Je recommande aussi de postuler à des annonces qui nous intéressent que moyennement, histoire de s’entraîner à l’interaction. Il n’y a pas de secret : il faut manger de l’entretien d’embauche, parce qu’on est toujours mauvais au premier.
Vous dites qu’il y a un point essentiel auquel on pense rarement : connaître ses propres attentes et savoir en parler. Pouvez-vous développer ?
Patrice Ras : Pour avoir recruté des jeunes diplômés comme des cadres confirmés, je me suis souvent aperçu que beaucoup de candidats ne verbalisent pas suffisamment leurs envies, leurs attentes, leurs doutes. C’est pourtant ce qui rend un entretien humain et un candidat attractif, singulier et sûr de lui. Plus qu’être dans une forme de passivité, il est recommandé de préparer des questions pertinentes à poser à la fin ou au cours de l’entretien. Cela démontre que vous êtes volontaire, affirmé, en mesure de cerner les attentes de la hiérarchie, mais aussi les vôtres. L’étape d’après, bien entendu, consiste à tenter de répondre à la question centrale et inévitable que le recruteur a en tête : pourquoi vous sélectionner et pas un(e) autre candidat(e) ? Recruter, c’est choisir, donc forcément comparer.
Quid de l’attitude corporelle du candidat, qui doit elle aussi être maîtrisée au cours d’un entretien d’embauche ?
Patrice Ras : Votre posture, vos gestes, la manière dont vous êtes assis et vos expressions faciales jouent un rôle crucial. La communication non verbale est le reflet de l’état d’esprit dans lequel vous êtes : quand on est droit sur sa chaise, sans être rigide, on paraît clair, confiant. Mais gare à ne pas trop y penser, il faut quand même être naturel ! L’essentiel est que le recruteur ne perçoive pas d’incohérence entre votre discours et les documents de votre candidature. Autre conseil de route au passage : si on veut anticiper au mieux l’échange et éviter les questions pièges, il faut que votre CV soit très clair.
Si vous deviez avertir les potentiels candidats sur les deux erreurs à éviter, quelles seraient-elles ?
Patrice Ras : On dit que la culture, c’est comme la confiture. Moins on en a, plus on l’étale. C’est un peu la même chose pour l’expérience que l’on vend à nos recruteurs en entretien d’embauche. Les candidat(e)s ont tendance à ajouter des éléments inutiles, voire dévalorisants ! Par exemple, un avocat me racontait qu’un candidat en entretien pour en stage avait passé cinq minutes à disserter sur sa cueillette de cerises à l’été dernier. Parfois, la piste extrascolaire est une fausse bonne idée. Cela ne veut pas dire que seuls les diplômes comptent. Mais il faut se poser la question : parmi tout ce que j’ai fait, qu’est-ce qui me valorise, qu’est-ce que cette expérience ou cet engagement raconte de moi ? Si je fais de la vidéo, même à un petit niveau, ça démontre une envie de raconter, une autonomie, une appétence pour l’image. Sans oublier le domaine le plus oublié des candidat(e)s, pourtant essentiel : l’aspect relationnel. Cela fait une vingtaine d’années qu’ils communiquent avec les autres, il faut donc savoir en tirer quelque chose : êtes-vous plutôt quelqu’un qui est à l’écoute ou qui motive les troupes ? Pour maximiser la sincérité, posez la question aux membres de votre famille, à vos amis.
Quelques conseils supplémentaires pour réussir son entretien d'embauche
- Envoyez un email de remerciement après l’entretien. C’est l’occasion de réitérer votre intérêt pour le poste et rappelez brièvement pourquoi vous pensez être un bon candidat.
- Préparez des exemples concrets tirés de votre expérience, vos formations, vos voyages, vos intérêts : oubliez les phrases trop génériques !
- Écoutez attentivement les questions et n’hésitez pas à prendre quelques secondes pour réfléchir avant de répondre. Cela montre que vous prenez la question au sérieux et que vous êtes réfléchi.