Des jeunes concernés par l'écologie
S’invitent désormais à table les débats sur la consommation, l’alimentation, le choix des destinations pour les vacances d’août et les manières quotidiennes de se déplacer. Aucun répit donc lorsqu'il s'agit d'écologie. En 2019, 55 % des foyers français disaient en discuter au moins une fois par semaine. Souvent, ce sont les adolescents, fraîchement politisés – depuis 2018, des milliers d’adolescents suivent ainsi la grève scolaire pour le climat tous les jeudis ou vendredis –, qui envoient remontrances et sentiment de culpabilité à leurs parents.
À raison ? Un enfant né en 2020 connaîtra sept fois plus de vagues de chaleur que ses grands-parents baby-boomeurs. Les réseaux sociaux, vecteurs d’un grand nombre d’informations relatives au réchauffement climatique, exposent davantage les jeunes à cette thématique. Alors sans surprise, en 2022, la protection de l’environnement est l’enjeu le plus préoccupant chez les 18-24 ans, alors qu’elle vient en deuxième position pour l’ensemble de la population, après le pouvoir d’achat.
Jeunes vs leurs parents : un décalage parfois important
Par ailleurs, 75 % des 15-25 ans considèrent leurs parents responsables de la situation actuelle. « Cette année c’est l’humanitaire au Maroc, et ensuite un voyage imprévu en Islande parce qu’un copain débarque. Ils vont sans doute aussi partir loin en automne, histoire de se changer les idées, et n’oublions pas le traditionnel match de rugby au Pays de Galles de la fin d’année, qui s’ajoutent aux allers-retours précédents », désespère Nicolas, dont les parents se sont installés en Corse pour la retraite, l’obligeant à exploser son empreinte carbone. Des reproches qui peuvent vite agacer les concernés. Sur le groupe Facebook Parents d’ados, suivi par 60 000 personnes, les parents exaspérés par les nouvelles convictions écologiques de leurs bambins se lâchent. Parmi les messages publiés à ce sujet, une image valant mieux que mille mots : « Un million d’adolescents veulent nettoyer la Terre. Un million de parents voudraient qu’ils commencent par leurs chambres. »
L’écologie, un pont intergénérationnel ?
Le sujet est en tout cas devenu brûlant, à tel point que l’Ademe, en sorte un rapport nommé Le dialogue intergénérationnel sur l’environnement, où l’on apprend que 71 % des jeunes ont déjà fait remarquer à un de leurs parents qu’une de leurs habitudes était mauvaise pour l’environnement. L’agence pour l’environnement insiste toutefois sur le fait que le dialogue n’est pas si conflictuel que l’on pourrait le penser, car 69 % des jeunes se sont aussi déjà fait remarquer par l’un de leurs parents que leurs habitudes, elles aussi, étaient mauvaises pour l’environnement. « On est choqués par leur consommation de viande et eux par nos achats de fringues en fast-fashion… » résume Lisa, 17 ans, lycéenne à Salon-de-Provence. Par ailleurs, que l’on ait 15 ans, 27 ans, ou 56 ans, une chose fait consensus : les conclusions scientifiques. Selon le même rapport, 79 % des jeunes jugent que les climatologues évaluent correctement les risques du changement climatique, soit la même proportion que chez les 55-75 ans (80 %).
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S’il est un sujet de tensions, l’écologie peut aussi devenir l’occasion rêvée d’un vrai échange… pour aboutir à des convictions partagées. « Nos trois enfants n’étaient clairement pas passionnés de jardinage avant que l’on organise des sessions collectives avec les enfants des voisins. Il n’y a pas de secret : il faut rendre ça ludique, et c’est un moyen de vivre des moments privilégiés en famille », témoigne Sarah, 33 ans, mère de trois enfants à Saint-Omer. Par ailleurs, les jeunes n’ont-ils pas aussi à apprendre des « boomers » ? « Pratiquez-vous le recyclage scolaire ? », interroge Claude, sur le groupe Parents d’ados. « Nos enfants sont tellement soumis aux regards des autres, et à la société de consommation. Petite, j’avais un beau cartable, une belle boîte de crayons de couleur, et ça me faisait au moins trois ans. Quand j’entends le mot écologie perpétuellement je me dis que si on commençait déjà par là ça pourrait être un début », termine-t-elle.
Conserves, réparation, vélo, faible niveau de consommation… Les recettes de grand-mère vont très souvent dans le sens de la sobriété. Et puisque l’écologie est intimement liée à la question sociale, les parents ne sont-ils pas des écolos qui s’ignorent ? « Mes ados prennent de longues douches, utilisent un maximum d’électricité… De 50 €/mois, je suis passée à 150 €. Je suis maman solo et ça devient compliqué », explique Véronique, 46 ans. Le duo fin du monde/fin du mois pourra-t-il mettre tout le monde d’accord ?