Récupérer du budget pour racheter
Rapporter ses anciens produits en boutique en échange d’un bon d’achat en magasin : les enseignes à proposer ce type d’offres sont de plus en plus nombreuses. Et ce, dans toujours plus de secteurs. Le prêt-à-porter a saisi le créneau il y a plus d’une décennie et représente aujourd’hui une grande partie de ce marché. Mais on retrouve des démarches similaires dans les magasins de téléphones et ordinateurs portables, cartables, et même chez les concessionnaires automobiles. Concrètement, ces bons représentent généralement un pourcentage assez faible de la valeur d’achat initiale du produit, et peuvent varier selon l’état du bien, notamment dans le cas d’appareils électroniques. En général, ces produits sont soit réinjectés sur le marché après réparation et/ou reconditionnement, soit envoyés dans des centres de recyclage lorsqu’ils sont en mauvais état. « Proposer un bon d’achat en échange est un moyen pour les marques de fidéliser leur clientèle », observe Ilfynn Lagarde, spécialiste de l’économie circulaire et fondatrice de Youzd, une plateforme d’achat et de revente d’équipement de la maison de seconde main.
Augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs
Qu’en est-il du consommateur ? Le premier argument mis en avant par les enseignes en faveur de ce dispositif est qu’il permet d’augmenter le pouvoir d’achat de leurs clients. « Cette stratégie marketing a un impact direct sur les prix, permettant aux consommateurs d’acheter moins cher ou plus pour le même prix », observe Béatrice Siadou-Martin, chercheuse experte en consommation responsable au sein de la Chaire Maréson à l’université de Montpellier. « Aujourd’hui, le consommateur est dans une recherche de variété », ajoute la chercheuse. Dans cette optique, lui donner la possibilité de ramener régulièrement ses achats en magasin est un moyen de concilier cette volonté avec des enjeux environnementaux de réemploi des produits. « Cela permet de capter tout le stock, notamment de vêtements et d’appareils informatiques, qui dorment trop souvent dans nos tiroirs », confirme Ilfynn Lagarde. Chaque année, les Français jettent en moyenne 200 000 tonnes de vêtements et autres accessoires vestimentaires, selon les données de Refashion. Soit environ 40 % de la production annuelle. Proposer aux consommateurs de ramener leurs achats en magasin est donc, théoriquement, une manière de faire un pas de plus dans la réduction de l’empreinte environnementale de secteurs souvent très polluants.
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Une incitation à la consommation
Mais, nuance Ilfynn Lagarde, « le principe de réinjection dans le marché de la seconde main ne fonctionne qu’avec des objets en très bon état ou dont le prix de revente sera suffisamment élevé pour que la réparation ou le reconditionnement, qui peuvent coûter très cher, soient rentables ». Autrement dit, en ce qui concerne la « fast-fashion », dont le prix de vente initial est déjà très bas, le coût de réparation est trop élevé pour espérer lui donner une seconde vie : « Dans ce cas, il n’y a pas d’économie circulaire. » Seuls certains produits sont donc susceptibles d’être réemployés. Certaines enseignes, comme Faume pour les vêtements et Back Market pour les téléphones et ordinateurs, en ont fait leur spécialité.
« Sur des marques low cost, on est clairement sur du greenwashing », poursuit Ilfynn Lagarde. Un greenwashing qui encourage ces enseignes à continuer de produire en masse et à polluer. En fin de compte, ce système ne pousse pas à remettre en question le modèle de la fast-fashion, intrinsèquement ultra-polluant, même si ces vêtements sont effectivement recyclés, car recycler pollue toujours plus que produire moins.
La question de la durabilité est essentielle, même en ce qui concerne le pouvoir d’achat des consommateurs. Si ce dernier augmente effectivement sur le court terme, la reprise contre bon d’achat est néanmoins « une incitation à la consommation et à l’achat frénétique », rappelle Béatrice Siadou-Martin : « Acheter un jean pour 140 euros, mais qui durera dix ans est probablement plus rentable que d’en racheter un chaque année. Même chose pour les cartables, qui sont maintenant changés chaque année. » Difficile de savoir si, sur le temps long, le consommateur est alors effectivement gagnant.
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