« Un tsunami. » C’est ainsi que Salomé, 34 ans, décrit l’arrivée de sa fille dans sa vie. C’était l’année dernière, une nuit d’avril. L’accouchement a duré huit heures et s’est « bien passé ». Après la joie de la rencontre, la Bordelaise a néanmoins ressenti d’autres émotions : l’inquiétude, l’angoisse, puis la culpabilité.
Retrouver ses repères après l’accouchement
« J’avais du mal à me déplacer, mon corps était comme endolori. J’ai eu l’impression que je ne pouvais pas m’occuper de mon bébé comme il le fallait, se souvient la jeune maman. Mon époux a pris le relais, mais je me sentais à l’écart de cette famille que nous venions de créer. En rentrant chez nous, ça allait déjà mieux, et c’est à ce moment-là que j’ai pu commencer à créer une connexion avec ma fille. » Dans l’appartement familial, Salomé retrouve ses repères, ce qui la rassure. La première semaine, sa mère, qui a pris quelques jours de congé, vient un jour sur deux pour donner un coup de main – lancer une lessive, passer un coup de balai – et en profite pour faire connaissance avec sa petite-fille. Elle apporte toujours de quoi préparer le repas de midi, de préférence un plat réconfortant comme des lasagnes ou de la soupe. Exactement ce dont Salomé a envie et besoin pour se concentrer sur son nouveau rôle de mère et, surtout, pour récupérer de ce marathon de neuf mois, clôturé par un effort physique extrêmement intense. « Mon corps était en ruine, dit-elle. Des sensations bizarres en marchant ou en m’asseyant, des saignements, un ventre tout flasque, la vulve en feu. Je ne me suis jamais sentie aussi fatiguée de ma vie. »
Quarante jours pour récupérer
D’après l’enquête nationale périnatale menée en 2021, 17 % des femmes ont trouvé la période suivant l’accouchement « difficile » ou « très difficile ». Pire encore : près d’une mère sur cinq souffrirait de dépression post-partum dans le mois qui suit la naissance, selon le site de la commission Les 1000 premiers jours. « L’isolement est la principale cause de ces difficultés », peut-on lire dans l’ouvrage Le Mois d’or — Bien vivre le premier mois après l’accouchement, dont la première édition s’est vendue à plus de 25 000 exemplaires. Popularisé en France par ses autrices, Céline Chadelat et Marie Mahé-Poulin, le concept du « mois d’or » peut se résumer ainsi : « Sortir de la focalisation sur le bébé et proposer des soins au corps de la mère, la soutenir émotionnellement, l’aider dans les tâches quotidiennes pour lui éviter les efforts et lui permettre de se rétablir. Une maman qui va bien, c’est un bébé qui peut aller bien », explique Marie Mahé-Poulin, également psychologue clinicienne. Cette pratique se retrouve dans plusieurs traditions culturelles, comme en Chine, où le « Zuo Yue Zi » se traduit par « rester assise un mois », ou en Amérique du Sud, où les femmes bénéficient d’une « cuarentena » (quarantaine). Si cette période est censée durer quarante jours – « le nombre quarante représente la transition, l’ouverture sur un nouveau chapitre […] dans le cadre postnatal, c’est le temps nécessaire pour retrouver des fonctions physiologiques en bonne santé », explique Le Mois d’or –, le temps de récupération peut s’étendre sur plusieurs mois. On parle alors de « quatrième trimestre ».
Anticiper et bien s’entourer
Salomé était enceinte de huit mois lorsqu’elle a lu Le Mois d’or. Elle en a surtout retenu une idée : « S’entourer de ses proches et déléguer un maximum de tâches ménagères. » Voilà l’ingrédient secret pour un post-partum apaisé. Les autrices du livre préconisent même de se préparer, en cuisinant des repas chauds, nutritifs et réconfortants à congeler — soupes, bouillons ou « lait d’or », une boisson à base de curcuma et de gingembre. En un mot : anticiper. Lorsque la jeune Bordelaise a parlé du mois d’or à son entourage, ses proches l’ont d’abord regardée d’un drôle d’air. « Cela faisait sens pour ma mère, mais elle ne comprenait pas l’intérêt de théoriser la chose. Du côté de ma belle-mère, en revanche, c’était l’incompréhension totale. Pour elle, je devais bouger le plus possible pour récupérer », confie-t-elle. Si, d’après Marie Mahé-Poulin, « il n’y a pas de façon parfaite de vivre un mois d’or », celle-ci insiste sur l’importance du « cercle de soutien ». « Nous avons tous un rôle à jouer, que l’on soit voisins, amis ou professionnels. C’est un vrai projet de société : il faut tout un village pour soutenir une famille », avance la psychologue, qui observe « une réelle prise de conscience depuis cinq ans, même s’il reste encore beaucoup à faire ».
De son côté, Salomé pense à une possible seconde grossesse : « J’aimerais mieux me préparer la prochaine fois, assure la jeune maman. Maintenant je le sais, c’est trop important pour mon bien-être, celui du papa et celui du bébé. »
LA FAMILLE S’AGRANDIT ?
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