1 François Gabart, skipper du trimaran MACIF, adepte de la sieste ou du sommeil fractionné
Quel est le point commun entre les marins, les militaires et les chirurgiens ? Leur activité les contraint à rester éveillés durant plusieurs jours, voire semaines ou à avoir un rythme décalé, en accumulant une dette de sommeil. Quel est le secret de ces professionnels pour gérer la situation ? Réponse : le sommeil fractionné, qui consiste à répartir son sommeil en plusieurs phases de sieste au cours d’une journée, plutôt que tenter de s’en passer. À l’instar de François Gabart, skipper professionnel et détenteur du record du tour du monde en solitaire en 42 jours à bord du trimaran MACIF. À l’écoute de son rythme, il a su apprivoiser son corps pour rester éveillé longtemps, délaissant le rythme dit monophasique pour un sommeil polyphasique.
« Sur un bateau, on ne dort pas quand on veut. L’idée est de dormir quand on peut. On doit anticiper les phases de sommeil, profiter des opportunités qui se présentent et apprendre à dormir et à récupérer très vite, explique le marin. Avant de m’endormir, j’enclenche un chronomètre pour enregistrer mon temps de sommeil. Au réveil, j’évalue la qualité de mon sommeil sur une échelle de 1 à 5. C’est subjectif, mais ça me permet d’assurer à peu près un suivi et d’être plus vigilant si je constate que je n’ai pas beaucoup dormi dans les dernières 24 heures. »
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L’homme est fait pour vivre le jour et dormir la nuit
Le corps humain est conçu pour vivre le jour, et dormir la nuit. C’est pourquoi le sommeil nocturne monophasique est de meilleure qualité que le sommeil fractionné, aussi appelé polyphasique. Il est par ailleurs dépendant de la stimulation lumineuse : le rythme circadien, régi par l’horloge biologique, est chargé de contrôler le sommeil, les capacités cognitives, la sécrétion d’adrénaline, la température corporelle, la pression artérielle, et d’autres fonctions physiologiques de notre organisme. De plus, l’homme est soumis aux rythmes de la planète Terre et se trouve en lien avec son environnement extérieur (lumière, bruit). C’est pourquoi, toute perturbation de l’horloge biologique peut avoir un impact sur la santé.
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3 Gare à la dette de sommeil
« Il est important de ne pas tomber dans une dette de sommeil importante et de trop repousser ses limites car on n’arrive jamais à récupérer derrière, prévient François Gabart. Il faut essayer de trouver son équilibre. Pour moi, le sommeil fractionné commence par dormir parfois quelques secondes, parfois quelques minutes. Mais, en moyenne, je dors environ 20 minutes. C’est une durée de repos qui me correspond bien et qui permet de bien recharger les batteries. C’est rare en solitaire de faire plus. Par contre, il peut m’arriver de dormir 20 minutes, puis de me réveiller quelques minutes pour vérifier que tout se passe bien sur le bateau et de redormir 20 minutes. »
Aujourd’hui, de nombreuses personnes ont un rythme de sommeil décalé du fait même de la nature de leur profession : pompiers, policiers, personnels d’aviation, professionnels de la santé, transporteurs routiers, etc.
Le rapport au temps et la façon de travailler ont beaucoup changé. Selon un rapport de l’Anses (2), « les formes d’organisation du travail évoluent, conduisant aujourd’hui à un nombre très important de travailleurs concernés par des horaires et rythmes de travail dit “atypiques”, notamment le travail posté (3) ou encore le travail de nuit ».
Ces travailleurs de nuit et/ou de rotation souffrent d’un décalage horaire permanent et ont une horloge biologique perturbée qui va générer des troubles importants dans la qualité et la quantité de leur sommeil. Car le sommeil de jour n’est pas aussi réparateur que celui de la nuit. De plus, le sommeil fractionné a des conséquences rapidement identifiables.
« On peut toujours repousser la limite, mais cela se fait au prix d’une perte de clairvoyance et de fraîcheur physique, souligne François Gabart. La rapidité de décision décline, les réflexes se font moins efficaces. Si on tente d’aller trop loin, le corps nous le signale clairement par une perte de lucidité, voire parfois des hallucinations. Ces signaux sont alors à prendre au sérieux. »
4 Méditation, hypnose, relaxation : autant de techniques qui aident à trouver le sommeil
Le skipper du trimaran MACIF teste différentes techniques depuis 15 ans pour améliorer la qualité de son sommeil.
« J’ai travaillé sur différentes pratiques : un peu de sophrologie, d’hypnose, de relaxation, de méditation… Pour moi, elles se complètent toutes. Au fil des années, j’utilise un mélange de tous ces outils. Et par la pratique, on développe la connaissance de son corps et on comprend mieux ce qui nous correspond. C’est difficile à définir car ce sont des techniques propres à chacun. Il est important de bien connaître son corps et de savoir bien s’écouter. Il n’y a pas de recette miracle. On travaille avec des médecins pour nous accompagner, on essaie d’échanger entre marins pour bénéficier des techniques des uns et des autres. Il est important de faire du sport, de bien manger : en somme, de prendre soin de soi ! »
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Les multiples bénéfices d’un bon sommeil ne sont plus à prouver : amélioration de la concentration et de la vigilance, stimulation des fonctions cognitives et de la mémoire, il remédie à la fatigue chronique. Sans oublier son action bénéfique au niveau cérébral, cardiovasculaire, musculaire et immunitaire car le sommeil influe directement sur la quantité de cellules naturellement tueuses (cellules NK), créées par l’organisme en cas de défense contre les agressions par des corps étrangers. Mieux reposé, l’organisme est plus à même de se défendre contre les différentes infections (allergies, maladies virales, etc.).
C’est pourquoi François Gabart profite d’être à terre pour effectuer un travail de préparation avant les courses, mais aussi de récupération après celles-ci :
« En amont des courses, je fais de courtes siestes pour préparer mon corps aux phases de sommeil décalé. Il est impossible de prendre du crédit de sommeil, mais il est possible de commencer à habituer le corps à un rythme différent. En revanche, au retour de course, j’essaie de dormir de la manière la plus classique possible, sans excès de grasse matinée ou de sieste, afin de reprendre un rythme de sommeil normal. »